Quand on pense à investir à l’étranger, on imagine souvent des démarches complexes : ouverture de comptes bancaires hors de France, fiscalités étrangères difficiles à maîtriser, ou encore investissement direct dans des biens immobiliers situés à des milliers de kilomètres. Pourtant, il existe une voie beaucoup plus simple et souvent méconnue pour diversifier ses placements à l’international : le Plan d’Épargne en Actions (PEA).
Ce véhicule d’investissement, très apprécié pour ses avantages fiscaux, est généralement perçu comme limité aux actions françaises ou européennes. En réalité, grâce aux ETF (trackers) et SICAV éligibles, il est possible d’obtenir une exposition mondiale tout en conservant son PEA, et donc de profiter de la croissance des marchés étrangers sans quitter le cadre fiscal avantageux français.
Dans cet article, nous allons explorer en profondeur comment investir à l’étranger via un PEA, quels types de fonds permettent d’atteindre cet objectif, quels sont les avantages et limites de cette stratégie, et comment bâtir un portefeuille diversifié.
Qu’est-ce que le PEA et quelles sont ses règles principales ?
Le Plan d’Épargne en Actions (PEA) est un dispositif d’investissement créé en France pour encourager l’investissement en actions. Son principal avantage réside dans la fiscalité :
- Les plus-values et dividendes réinvestis dans le PEA sont exonérés d’impôt sur le revenu après 5 ans (hors prélèvements sociaux).
- Le plafond de versement est de 150 000 € pour un PEA classique et de 225 000 € pour un PEA-PME, destiné à financer les petites et moyennes entreprises.
Cependant, le PEA est soumis à une contrainte : il ne peut contenir que des titres émis par des sociétés dont le siège social se trouve dans l’Union européenne (UE), en Islande, en Norvège ou au Liechtenstein, ou bien des OPCVM (SICAV, FCP, ETF) eux-mêmes éligibles au PEA.
C’est ici que la subtilité apparaît : si une société chinoise ou américaine ne peut pas être détenue directement dans un PEA, il est possible d’y accéder indirectement via un fonds ou un ETF éligible, domicilié dans l’UE, mais qui réplique un indice étranger.
Comment investir à l’étranger avec un PEA ?
La clé pour s’exposer à des marchés internationaux avec un PEA, ce sont donc les ETF (trackers) et SICAV UCITS éligibles.
1. Les ETF mondiaux
Certains ETF répliquent des indices larges, comme le MSCI World, qui couvre plus de 1 600 entreprises dans 23 pays développés. Ces ETF sont souvent éligibles au PEA, car ils sont domiciliés en Irlande ou au Luxembourg, tout en offrant une exposition mondiale, y compris aux États-Unis, au Japon ou à l’Australie.
2. Les ETF émergents
Pour diversifier au-delà des marchés développés, il est possible d’investir dans des ETF suivant des indices émergents, comme le MSCI Emerging Markets. Cela permet de s’exposer à des économies en forte croissance comme la Chine, l’Inde, le Brésil ou l’Afrique du Sud.
3. Les SICAV thématiques
Certains OPCVM éligibles au PEA se spécialisent dans des thématiques internationales :
- Technologies mondiales (géants américains inclus via fonds domiciliés en Europe)
- Transition énergétique
- Santé et biotechnologies
- Infrastructures mondiales
Ces fonds sont particulièrement intéressants pour capter des tendances de long terme qui dépassent les frontières européennes.
4. Les ETF régionaux
Il est également possible de trouver des ETF axés sur une zone spécifique :
- Asie hors Japon (Chine, Corée, Inde)
- Amérique latine
- Afrique émergente
Ils permettent une exposition ciblée aux zones où l’on anticipe un potentiel de croissance supérieur à celui des marchés développés.
Les avantages d’investir à l’étranger via un PEA
1. Un cadre fiscal attractif
L’avantage majeur reste la fiscalité : investir à l’étranger via un PEA permet de profiter de la diversification internationale tout en bénéficiant de l’exonération d’impôt sur le revenu après 5 ans. Dans un compte-titres ordinaire (CTO), les gains seraient imposés au prélèvement forfaitaire unique (PFU) de 30 %.
2. Une gestion simplifiée
Au lieu d’ouvrir des comptes à l’étranger ou de jongler avec différentes fiscalités locales, tout est centralisé dans le PEA. Vous restez dans un cadre réglementaire français, ce qui simplifie la gestion et le suivi.
3. Une diversification mondiale
Grâce aux ETF et SICAV éligibles, vous pouvez avoir un portefeuille exposé à toutes les grandes zones économiques : États-Unis, Asie, Amérique latine, Afrique. Cela permet de limiter les risques liés à une seule économie.
4. Des frais souvent réduits
Les ETF, en particulier, sont des produits à frais de gestion faibles (0,1 % à 0,4 % par an en moyenne), ce qui en fait une solution accessible pour diversifier son portefeuille à l’international.
Les limites et points de vigilance
1. Un univers restreint
Tous les ETF mondiaux ou émergents ne sont pas éligibles au PEA. Il faut vérifier systématiquement l’éligibilité auprès de son courtier.
2. Risque de change
En investissant dans un ETF exposé aux États-Unis ou à la Chine, vous êtes aussi exposé au risque de change (euro/dollar, euro/yuan). Certains ETF proposent une couverture contre ce risque, mais souvent avec des frais supplémentaires.
3. Risques géopolitiques et économiques
Les marchés émergents, en particulier, présentent des risques de volatilité, de gouvernance ou de stabilité politique.
4. Frais cachés
Les SICAV thématiques peuvent parfois facturer des frais de gestion élevés, jusqu’à 2 % par an. Il est donc important de comparer les options.
Exemple concret d’un portefeuille PEA diversifié à l’international
Voici une allocation type pour un investisseur souhaitant diversifier son PEA au-delà de la France et de l’Europe :
- 40 % sur un ETF MSCI World (exposition globale aux marchés développés, dont 60 % USA)
- 20 % sur un ETF Emerging Markets (Chine, Inde, Brésil)
- 15 % sur un ETF Asie hors Japon (fort potentiel de croissance à long terme)
- 15 % sur un fonds thématique mondial (par exemple : transition énergétique ou technologies)
- 10 % sur un ETF Amérique latine ou Afrique (diversification supplémentaire à haut potentiel)
Avec une telle répartition, l’investisseur bénéficie d’une exposition mondiale équilibrée, tout en profitant du cadre fiscal du PEA.
Étapes pratiques pour investir à l’étranger via un PEA
- Ouvrir un PEA auprès d’une banque ou d’un courtier en ligne
Les courtiers en ligne comme Boursorama, Fortuneo, Bourse Direct ou Degiro (pour CTO) offrent souvent une gamme plus large d’ETF PEA-éligibles. - Identifier les ETF ou fonds éligibles
Consulter les fiches produits pour vérifier l’éligibilité PEA et les frais. - Diversifier progressivement
Ne pas investir tout son capital d’un coup, mais lisser les investissements dans le temps pour réduire le risque lié à la volatilité. - Suivre et rééquilibrer
Rééquilibrer son portefeuille une fois par an pour maintenir la répartition souhaitée, surtout si une zone géographique surperforme fortement.
Investir à l’étranger ne signifie pas forcément multiplier les comptes bancaires et se perdre dans les fiscalités internationales. Grâce au PEA et à l’univers des ETF et SICAV éligibles, il est aujourd’hui possible de bâtir un portefeuille largement diversifié à l’international tout en profitant d’un cadre fiscal exceptionnel.
Cette stratégie présente l’avantage de combiner simplicité, efficacité et optimisation fiscale, tout en permettant d’accéder à des marchés mondiaux porteurs de croissance. Certes, elle demande de la rigueur dans le choix des fonds et une bonne compréhension des risques (change, volatilité, frais), mais elle constitue une alternative puissante pour diversifier son patrimoine sans quitter la sécurité du cadre français.
En résumé : le PEA, souvent considéré comme franco-français, peut devenir une porte d’entrée vers l’investissement international. Il suffit de savoir où chercher et comment composer son portefeuille pour transformer ce dispositif en véritable tremplin mondial.